Telle est la question…

C0NN3X5 I am, Kipling

I keep six honest serving-men
(They taught me all I knew);
Their names are What and Why and When
And How and Where and Who.

R. Kipling, Just so stories, The elephant child

J’ai six bons serviteurs

(ils m’ont appris tout ce que je sais) :

Leurs noms sont Quoi et Pourquoi et Quand

Et Comment et Où et Qui

R. Kipling, Histoire Comme Ça, L’Enfant D’Éléphant Continue reading « Telle est la question… »

Devenir

L’humanité comme qualité n’a rien d’inné ; elle s’acquière lorsque l’être cultive sa nature divine et, acceptant sa nature animale, la transcende. 

De la morale.

Ainsi certains que nous acceptons dans notre société, ne sont guère plus que des bêtes portant le masque d’homme, tandis que d’autres ayant oublié leur nature animale, jugent leurs actes selon une morale que les bêtes ignorent. Si les animaux ne peuvent être tenus de respecter des règles morales qu’ils ne comprennent pas, les hommes peuvent en apprendre la valeur. 
Au sein d’une société, chacun est responsable de la transmission des valeurs communes aux autres membres du groupe. Ainsi il ne suffit pas de dire : Regardez, il ne sait même pas qu’il fait mal. L’éducation est de la responsabilité de tous. Et lorsque ces valeurs sont transmises, à chacun d’en tirer profit et d’accepter ou de refuser les règles. Devenu moral, l’homme est responsable de ses choix. 
Il devient libre, car s’il n’y a pas de limites, qui peut dire ce que sont liberté ou captivité ?

Parallèlement, (IV) autre explication

(…)

 » (…)

On peut mourir pour telle ou tel, on vit pour soi,
Même quand on voudrait vivre pour tel ou telle !
Et puis l’heure sévère, ombre de la mortelle,
S’en vient couvrir les trois quarts du cadran.

Il faut dès ce jourd’hui, renier le tyran
Plaisir, et se complaire aux prudents hyménées,
Quittant le souvenir des heures entraînées
Et des gens. Et voilà la norme et le flambeau.
Ce sera bien. »
L’Amour :
« Ce ne serait pas beau. »

Paul Verlaine

Rudyard Kipling

Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou perdre d’un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir,
Si tu peux être amant sans être fou d’amour ;
Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre
Et te sentant haï, sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;

Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles,
Sans mentir toi-même d’un mot ;
Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les Rois
Et si tu peux aimer tous tes amis en frères,
Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi ;

Si tu sais méditer, observer et connaître,
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur
Rêver, sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser, sans n’être qu’un penseur ;
Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu peux être bon, si tu sais être sage,
Sans être moral ni pédant ;

Si tu peux rencontrer triomphe après défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront ;
Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tout jamais tes esclaves soumis
Et ce qui vaut bien mieux que les Rois et la Gloire,

Tu seras un Homme, mon fils.

anniversaire

Je vieillis. Je sais, c’est facile, on le fait tous tout le temps. Il parait que ça fait 27 ans pas tout rond que je vous enquiquine, (et oui, l’âge que voulez-vous ! C’était le 31.01. Comment ça vous le saviez ? et vous l’avez pas dit ? ! ) je me suis dis que ça se fête. Croyez-pas ?

Histoire comme ci – Le premier chat (quantique)

boite_moutonSoit un chat (de préférence un Vrai Chat) que l’on place dans une boîte étanche en compagnie d’une fiole de cyanure qui doit se briser dès que le compteur Geiger accouplé se déclenche.

Cette torture subtile inventée par un scientifique (fou) du nom de Schrödinger avait pour but de démontrer une théorie très compliquée d’où il ressort ceci : tant qu’on ne regarde pas dans la boîte, le chat est à la fois vivant et mort.
La curiosité des chats est légendaire, celle des scientifiques ne l’est pas moins, le malheureux chat victime de cette farce s’est donc douté que tôt ou tard un autre dingue viendrait voir s’il était vivant ou non. Et là c’est 50/50. Une chance sur deux d’y passer. Le chat a donc décidé de prendre la poudre d’escampette et les circonstances aidant, il est devenu le premier chat quantique, capable de se déplacer dans l’espace et le temps et disposant de bien plus de neuf vies (puisqu’il est parti avant qu’on ouvre la boîte, il est toujours vivant et mort en même temps).

Et c’est depuis ce temps-là Mieux-Aimée que le chat est toujours du mauvais côté de la porte quand il veut nous faire enrager, même si on est sûr de l’avoir enfermé à double tour…

La horde

« Au commencement fut la vitesse, le pur mouvement furtif. Puis le cosmos décéléra, pris consistance et forme, jusqu’aux lenteurs habitables, jusqu’au vivant, jusqu’à nous. Bienvenue à toi, homo lento, homo legato, poussif tresseur de vitesse ! »

Parler de la horde est difficile. Il y a trop à dire et j’aurai la sensation de perdre la pureté du message originel en l’édulcorant trop. Pourtant cette œuvre m’a tant émue, remuée, fait réfléchir que je me sens comme une obligation de transmettre le témoin. Oui oui, œuvre, n’ayons pas peur du mot, car c’est bien plus qu’un simple livre. Outre le fait qu’un CD musical accompagne la lecture, bande-son du livre, il s’agit d’un univers en son (en soit), complet, vivant.

L’étoffe dont sont tissés les vents

S’il est difficile d’entrer dans le livre, il est impossible d’en sortir. Même à présent, près d’un an après ma première lecture (oui, je l’ai déjà relu plusieurs fois…) il me semble n’en être pas sortie.
C’est que pour étrange qu’il paraisse, « La horde du contrevent » parle de nous, de notre monde, de nos relations avec ceux qui nous entourent. Continue reading « La horde »

the elephant child

– Je voudrais bien savoir pourquoi…
– QU’EST-CE QUE TU DIS ?
– Rien rien, je n’dis rien… mais tout d’même je voudrais bien savoir…
– Viens ici qu’on t’cogne !
– Aïe, Ouille, ouillouillouille !
– M’en fiche j’ai la peau dure, ça fait pas mal… pfff ! Même pas mal !

Y z’ont beau cogner, rien n’y fait : plus on m’cogne, plus je m’interroge… Je me rappelle clairement ma première question.
J’ai six ans, je suis en CP. C’est le printemps, je rentre de l’école. Je referme la lourde porte du garage. La maison est vide, maman sera bientôt là.
Que/qui serais-je, si j’avais un frère ?

Aujourd’hui je sais : il aurait été là, tout simplement, pour moi. Et la solitude aurait eu peur, elle se serait enfuie doucement, sur la pointe des pieds, sans se faire remarquer.
Et moi je découvre seulement ce que je peux être, sans elle.
Et peut-être que si vous m’aidez à chercher, ensembles, on pourra lui flanquer la frousse de sa vie !

La foule

Elle était perdue dans la foule.
Être perdue, elle en avait l’habitude et cela ne l’effrayait pas. Elle savait pouvoir retrouver son chemin. C’était ce monstre aux mille visages qui l’oppressait, l’étouffait. Un remous dans le flot l’aurait écrasée, anéantie comme rien.

Elle restai prudemment sur le bord, longeant les larges rues de l’exposition sans se mêler aux badauds, attentive même à ne se laisser frôler par personne. Les larges étals colorés la fascinaient. De nombreux artisans venus du monde entier s’étaient rassemblés là avec leurs articles inconnus. Malgré le ciel gris les couleurs lui paraissaient plus vives et les odeurs la déroutaient.
– Ariane !
Son père la cherchait. Sa voix avait une pointe d’impatience qu’elle avait appris à reconnaître : il l’avait déjà appelée et elle ne l’avait pas entendu.
Elle se dirigea vers sa voix en aveugle. Elle aperçut bientôt sa silhouette. Il se tenait au milieu de la ruelle, forçant les gens à le contourner, et grognait en regardant de tous côtés pour tenter de l’apercevoir.
Elle prit une grande inspiration, rassemblait son courage et entreprit d’écarter ceux qui la séparaient de son père. Elle fut bousculée, injuriée, écrasée, puis un dernier remous la jeta
près de lui.
– Où étais-tu encore fourrée ? On te cherche partout. Allez viens, il y a un spectacle. Ca va te plaire, tu verras.
Elle ne devait pas avoir l’air très enthousiaste car il lui pressa l’épaule et ajouta « Allez, viens vite ». Elle se dégagea de son étreinte et le suivit lentement, traînant des pieds autant que possible.