J’ouvre les yeux. Un halo éclatant. Je persiste, le halo se résout en formes laiteuses entourées de bleu vif. Le ciel. Un vent froid balaie mon visage et mes sensations reviennent d’un seul coup, douloureuses. Je suis resté trop longtemps immobile sur la terre dure, mes muscles fatigués protestent. Je me lève pourtant, il faut redescendre ou risquer d’être surpris par la nuit sur les sommets. Il va falloir revoir mon programme à la baisse, je ne peux plus gambader comme je le faisais à 25 ans. J’aurai aimé trouvé un brin de muguet à apporter à Eléanore mais à cette altitude il est toujours plus tardif. Elle ne m’en voudra pas. Je me corrige tristement, elle ne m’en aurait pas voulu, elle qui a été auprès de moi si longtemps. Je reprends mon sac. Mon dos proteste comme je ramasse ma canne et je reprends le sentier vers la vallée, le pas léger, libre.